Les réponses de Colombe Brossel à notre questionnaire

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LES RÉPONSES AU QUESTIONNAIRE DU COLLECTIF APPRENDRE ENSEMBLE
 DE COLOMBE BROSSEL, CANDIDATE DU PARTI SOCIALISTE
AUX LÉGISLATIVES DANS LA 17ème CIRCONSCRIPTION

Selon vous, quelles mesures faut-il prendre pour lutter contre la forte ségrégation sociale qui existe dans les établissements scolaires du 18e et du 19e arrondissement ?

La mixité sociale et scolaire est un enjeu majeur pour notre jeunesse car elle à la fois la condition de la réussite de tous et un outil d’émancipation et d’ouverture aux autres. Pour atteindre une mixité effective dans les établissements tous les leviers doivent être activés. Bien entendu l’un d’eux est la définition des périmètres de recrutement des écoles et collèges. Mais force est de constater les phénomènes d’évitement de certains établissements par des familles qui pourtant vivent à proximité. C’est pourquoi les cartes scolaires mêmes équilibrées avec soin nécessitent également que des moyens conséquents soient investis dans ces établissements pour les rendre attractifs : travaux, projets, voyages, portes ouvertes, résidences d’artistes, options rares, présence d’adultes en nombre suffisant…  Seul un engagement du quotidien sur tous les fronts peut inciter les familles plus favorisées à inscrire leurs enfants dans leur établissement public de secteur, c’est le travail dans lequel se sont engagées les équipes municipales auxquelles j’ai appartenues depuis 2008.

Quel regard portez-vous sur l’expérimentation des secteurs multi-collèges dans le 18è arrt ?

J’y ai été et y suis toujours extrêmement favorable. Par ce qu’il n’y a pas de remède miracle pour faire progresser la mixité sociale et scolaire dans les écoles, expérimenter de nouvelles solutions, surtout lorsqu’elles ont été pensées en concertation avec des chercheurs, les communautés éducatives et les élus, est même une nécessité tant que les disparités entre établissements seront si fortes. Cette idée d’ailleurs fait partie des  pistes évoquées depuis de nombres années  par des rapports parlementaires ou des études scientifiques qui constatent année après année à la fois la dangerosité des politiques de « libre choix » ou d’assouplissement de la carte scolaire et l’inefficacité du système actuel. Pourquoi même ne pas imaginer des secteurs « à cheval » sur plusieurs départements, ou communs à plus de deux collèges, quand cela est possible ?

Des solutions nouvelles sont encore à inventer, et pour moi, réduire les inégalités, faire de nos établissements de véritables creusets républicains, permettre aux générations futures de vivre, de grandir et d’étudier ensemble en citoyens éclairés, dans les meilleures conditions, sont des enjeux qui mériteraient même un véritable débat national.

Dans les territoires où l’évitement crée une ségrégation inacceptable, l’État pourrait imposer aux parties concernées d’agir. Qu’en pensez-vous ?

Avoir des indicateurs communs de mixité des établissements est un préalable qui me semble nécessaire. Savoir de quoi l’on parle et le mesurer est la condition à toute ambition partagée. Et l’idée d’établir par exemple un seuil minimal d’élèves boursiers par établissement, sorte de LRU scolaire qui, couplée à la présence de classes à pédagogies adaptées, qui permettrait aux établissements situés dans les quartiers les plus privilégiés d’être plus mixtes socialement et scolairement pourrait tout à fait être elle aussi expérimentée. Pour atteindre cet objectif il faut engager un dialogue avec l’ensemble des parties concernées : pouvoirs publics et communautés éducatives, afin de susciter l’adhésion du plus grand nombre, qu’il s’agisse de l’instauration dès le collège d’une sectorisation « multicritères », d’un travail sur le réseau de transport ou l’anonymisation des procédures d’inscription.  Dans le même temps il conviendrait de reposer la question du partage de compétence entre les départements qui définissent encore les périmètres de recrutement des collèges (sur quels critères, avec quels objectifs, quelle méthode, quels outils, quel calendrier) et les services académiques qui eux affectent les élèves, et donc accordent aujourd’hui les dérogations à ces mêmes périmètres.

Par ailleurs il est important de veiller à ne pas « vider » de leurs bons éléments les établissements des quartiers populaires, sous couvert de l’idée noble de permettre à tous le meilleur. Je ne souhaite pas un système scolaire qui condamnerait les moins bons à ne grandir qu’entre moins bons, et les meilleurs à n’évoluer qu’entre meilleurs.  Pour que les établissements les plus ghettoïsés deviennent véritablement attractifs il faut d’une part les engager dans les plans de renouvellement urbain et de mixité de l’habitat et d’autre part leur proposer des moyens supplémentaires pour mener des projets d’établissements innovants et audacieux (par exemple des jumelages avec des institutions culturelles, scientifiques, ou avec des établissements étrangers…).

Mais si les différentes démarches de concertation n’aboutissent pas, alors l’État doit jouer son rôle de régulation au niveau national et mettre en œuvre les leviers d’action.

Les secteurs multi collèges qui se mettent en place à l’échelle nationale et à Paris doivent être vus comme des premiers pas, dont il faudra tirer toutes les leçons, afin de généraliser cette pratique.

Selon vous, l’enseignement privé devrait-il être soumis à des règles pour accueillir des élèves d’une plus grande diversité sociale et scolaire ? Si oui, comment ? Sinon, pourquoi ?

A la veille de la rentrée des classes, Thomas Piketty avait publié un article sur la mixité sociale dans les collèges à Paris proposant de faire rentrer les collèges privés (sic.) dans une procédure commune d’affectation des élèves aux collèges ». Cet engagement de l’enseignement privé est nécessaire. Mais ne nous leurrons pas, imposer en contrepartie d’un financement public à ces établissements des élèves socialement plus défavorisés ne garantirait pas plus de mixité, ni sociale, ni scolaire, dans les établissements publics, et cela pourrait même, si c’est le seul levier activé, rendre moins lisible la spécificité de l’offre publique d’éducation, sauf à lever les derniers verrous à l’intégration des établissements qui remplissent des missions de service public et en remettant en question le statut de contrat d’association. Il faut donc prendre à bras le corps la question de la concurrence scolaire. Et force est de constater que là où la puissance publique s’est désengagée une offre alternative d’enseignement s’est constituée. Afin d’assurer à chaque enfant, famille et équipe éducative, une offre publique d’enseignement de qualité et de proximité, il est donc urgent de mettre fin à la double concurrence qui frappe nos écoles et engager ces deux chantiers dans un même mouvement. Pour que les familles ne soient plus tentées de voir si l’herbe ne serait pas plus verte ailleurs il faut redonner confiance dans l’école ou le collège de quartier. Mais tant que subsistera une offre attractive d’enseignement alternatif, nous ne pourrons aspirer qu’à être les bons élèves d’un mauvais système. Enfin, si l’engagement de l’enseignement privé est utile, il doit être clairement encadré. Mettre en œuvre l’objectif de mixité sociale ne doit pas faire oublier l’enjeu essentiel de la réussite pour tous. Ainsi, afficher plus de mixité dans un établissement, par exemple en ne recrutant que les meilleurs élèves issus de familles moins aisées, permettrait certes plus de mixité sociale mais ne remplirait en rien les objectifs fixés en matière de réussite. Il faut donc dialoguer avec confiance avec les responsables de l’enseignement privé mais ne pas ignorer les spécificités de leurs capacités à recruter.

Quelle priorité accorderez-vous à ces problématiques dans votre action au sein de l’Assemblée nationale ?

C’est en tant que femme de gauche, engagée dans un travail de fond auprès des habitants-e-s et des associations dans chacun de nos quartiers, soucieuse de placer la lutte contre les inégalités au cœur des politiques publiques, que je me présente pour être élue à l’Assemblée Nationale. Forte de ces valeurs, mes priorités seront l’éducation, d’abord et toujours, la transition écologique, la défense de nos services publics et de notre modèle social, la lutte contre le racisme et les discriminations et la refondation de l’Europe. Depuis que je suis engagée, dans le monde associatif comme en politique, l’égalité et la justice sociale ont toujours guidé mes décisions, et j’ai notamment eu l’honneur de mettre cet engagement au service des Parisiens lorsque j’ai été nommée adjointe en charge des questions d’éducation et de la réussite éducative en 2008. C’est avec la même conviction que je continuerai à me battre pour un système d’éducation plus juste pour les citoyens de demain si je suis élue députée.

Quelles actions envisagez-vous ?

Députée, je m’engage à :

  • Soutenir le recrutement d’enseignants, afin de réduire le nombre d’élèves par classe, permettre le remplacement systématique des enseignants absents, notamment dans les quartiers populaires. Tout faire pour éviter les fermetures de classe afin de maintenir un nombre bas d’élèves par classe ;
  • Accroître la formation proposée aux enseignants, afin qu’ils puissent bénéficier du droit élémentaire à la formation, mais aussi être remplacés lorsqu’ils s’absentent ;
  • Promouvoir la création d’un service public du soutien scolaire pour donner aux élèves les mêmes chances de réussir à l’école ;
  • Développer le soutien de l’Etat au soutien aux familles : en soutenant les crèches et haltes-garderies reconnues comme facteur d’insertion professionnelle, en développant les lieux d’actions parents enfants pour le soutien à la parentalité ;
  • Développer les passerelles maternelle/élémentaire et élémentaire/collège afin de soutenir les enfants dans ce moment particulier de leur scolarité.

 

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